IMPRESSIONS

Les "restaurants" de la rue d'Ethiopie

Si vous vous promenez rue d'Ethiopie de jour, vous verrez des panneaux "Restaurant Le Golden", ou le Sham's, le Palissandre ...
Si vous y passez de nuit, vous verrez une dame ronde ou un vieux monsieur assis sur une chaise à côté de la porte d'entrée et et des néons allumés au dessus. Et si vous avez faim, ce n'est pas l'endroit idoine pour remplir votre estomac. Car si vous avez la curiosité d'entrer, vous vous trouverez dans une pièce sombre, avec un bar immense, parfois une boule à facettes, des fauteuils bas et un bar immense avec souvent un miroir derrière et un nombre de serveuses derrière ce bar ne correspondant pas au nombre de clients dans le local. Restaurant, est une façon de tourner la loi car pour avoir cette appellation il suffit de présenter quelques tables et de quoi s'y asseoir, pas de servir à manger. Ce sont des boîtes de nuit, des boîtes à marin, où tout peut s'acheter, les "clientes" éthiopiennes et djiboutiennes qui s'alanguissent dans les canapés et fauteuils et qui sont des prostituées ainsi que les serveuses derrière le bar. Pour celle-là il faut dédommager le gérant du bar (5000 fdj en 2010) de la "perte" de sa serveuse pour la soirée et de rétribuer la dite serveuse au même tarif. 

La première fois que je suis rentré dans le premier de ces restaurants, c'était à l'Oasis, au début de la rue d'Ethiopie, et avec Marie. Nous étions encore à l'hôtel, la télé, bof ! nous étions donc descendus pour faire un tour. Il faisait encore très chaud, et un rabatteur nous avait glissé deux coupons "une boisson consommée, une gratuite". Vingt et une heure, du temps à tuer, pourquoi pas ? Et puis on verra à l'intérieur si les menus sont intéressants ...

On entre : un bar immense, quelques serveuses derrière, en uniforme, chemisier blanc, pantalon rouge, un ruban noir au col en guise de cravate, toutes assez belles, et très souriantes, engageantes, même. Une piste de danse, une musique... assourdissante mais pas dépaysante, de la musique de boîte des années ... au moins ! mais pas une table ! Une jeune femme vient nous orienter vers deux fauteuils et une table basse et prend nos coupons et nos commandes. On se retrouve avec deux Perrier, je crois pour Marie, et deux Heineken pour moi. Pas d'autre client. 

On boit tranquillement, curieux mais perplexes. Impossible de discuter, quasiment, tellement la sono est poussée. Un mec entre, s'installe sur un tabouret du bar, commande une Heineken qui ne semble pas être la première de sa soirée, discute avec les serveuses derrière le bar. Entre à son tour une jeune femme qui était devant la porte d'entrée, dans la rue. Djiboutienne, habillée à l'européenne, lunettes à montures noires épaisses, on dirait presque une prof. lunettes, Le type se lève, l'enlace par derrière, l'embrasse dans le cou, elle se défend mollement, essayant plutôt seulement l'éviter plus que le repousser.

Nous regardons la scène, faute de distraction. Ils semblent se connaître, mais ne pas être intimes. La femme s'esquive quelques fois, le type revient mollement à la charge, on dirait un jeu, dont nous ne comprenons la signification. Le type finit pas vider sa bière et s'en va, la femme échange quelques mots avec les serveuses et elles éclatent de rire. Bon, ben il est l'heure de rentrer à l'hôtel. On finit nos consos, puis retour au bercail. Rien compris à tout ça et nous n'avons même pas demandé ce qu'ils servaient comme reps, mais nous ne sommes quand même pas complètement naïfs : ce n'est pas un vrai restaurant. Nous n'irons pas plus loin dans notre explorations de ces faux restaurants.

Puis pendant les deux premières années, de nombreuses fois des copains, des amis, des collègues nous proposent d'aller finir la soirée en boîte, le plus souvent au Golden, où ils semblent avoir leurs habitudes. Mais Marie n'est pas intéressée, et je ne tiens pas à sortir en la laissant seule à la maison. Bien que j'ai failli plusieurs fois céder, et que Marie m'ait encouragé à y aller au moins une fois pour voir, je n'y ai pas remis les pieds jusqu'au départ d'un ami, assistant technique.

Quoique si, une fois, avec deux jeunes collègues, un garçon et une fille, pour boire une bière, mais à une heure décente, vers 20 heures. Au Golden bien sûr, et à part le bar en fer à cheval, face à l'entrée, l'absence de lumière naturelle, la présence d'un deuxième bar, au fond de la salle, et le nombre de femmes seules sur les banquettes qui font le tour de la pièce, rien de très particulier. Même style de musique que le première fois (du Cloclo, Sardou, Téléphone, Oasis, ...) et la même impossibilité de parler.

Lors d'un des repas de départ de notre ami, bien arrosés, il me dit qu'avant de partir, il veut me faire connaître toutes les boîtes de Djibouti. Pour ses deux dernières soirées à Djibouti, il tient à ce que nous les passions ensemble à faire le tour des boîtes. 

Promesse d'ivrogne mais promesse tenue :  jeudi soir après un repas au restau, nous ramenons Marie et en route, direction, pour s'échauffer, le Golden.

Il est 22 heures, la rue d'Ethiopie commence à s'animer et les boîtes à se remplir. Légionnaires, militaires français principalement, couples blancs, quelques couples djiboutiens, mais rares, l'essentiel de la foule est des hommes. Les rabatteurs rabattent, nous entrons au Golden et nous installons au bar. Bruit, fumée, filles partout, nous commandons ... deux bières. Les serveuses semblent plus éveillées, plus intéressées par leur travail et les clients. Deux d'entre elles s'installent en face de nous, que j'apprendrai à connaître au fil du temps : les deux Sébélé (prononcer Sabla).



06/11/2013
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